La nuit de la naissance


Magali, de Paris, nous a envoyé une réflexion magnifique sur le temps de Noël.

La nuit de la naissance
24.12.2012

Introduction : les tons de l’attente

Nous qui nous préparons à Noël, nous cherchons à entrer dans le ton de cette fête, celui de la lumière douce, celui ténu et tendre de la consolation et de l’action de grâce. Et nous sommes étonnés de ne trouver que difficilement un psaume ou une lecture prophétique qui nous conduise dans la disposition juste. Des multiples accents qui s’entremêlent pendant l’Avent, et dont l’Evangile est tissé, celui de la venue glorieuse, celui de la louange, celui du jugement de la terre, de l’aspiration à la délivrance, tous nous sont nécessaires ; mais il nous semble confusément qu’aucun ne livre à soi seul le ton juste de l’attente, qu’aucun ne suffit à entrer dans la nuit de la naissance. L’évènement est trop grand pour ne pas bouleverser et reprendre toute notre manière de sentir.

Lorsque nos harpes et cithares sonnent trop fort et trop faux pour éveiller l’aurore (Psaume 108 :3), et que notre cœur n’est pas prêt, c’est le Seigneur qui nous enseigne. « Ce peuple ne s’approche de moi qu’en paroles, ses lèvres seules me rendent gloire, mais son cœur est loin de moi. La crainte qu’il me témoigne n’est que précepte humain, leçon apprise. C’est pourquoi je vais continuer à lui prodiguer des prodiges, si bien que la sagesse des sages s’y perdra, et que l’intelligence des intelligents se dérobera. » (Isaïe 29 : 13-14). C’est ainsi que Dieu donne ses leçons, non en donnant « ordre sur ordre, règle sur règle » (Isaïe 27 :10). Il vient bouleverser nos représentations, surprendre nos sentiments connus, pour mettre en nous un cœur de chair et un chant nouveau.

Le ton de la joie

C’est le cas d’abord pour cette joie qui sourd dans tous les évangiles de l’annonce et de l’enfance. « Réjouis-toi Marie, pleine de grâce, le Seigneur est avec toi ». L’exhortation adressée à la fille de Sion (Sophonie 3,14) était bien faite des mêmes paroles. Mais le plus touchant, c’est le goût intime que prend cette joie, lorsque l’immense rumeur de délivrance, celle de tout un peuple, est soudain contenue dans le cœur et dans le silence d’une jeune femme. La salutation qui la bouleverse est bien trop grande pour elle, elle se laisse toucher sans bien comprendre par la parole de consolation, et cependant c’est à elle que c’est adressé d’un coup, c’est en elle que l’évènement est recueilli, mûri, médité, accompli. Elle a dans son sein toute la joie du monde. Elle dont personne n’attend la bénédiction ni le sacrifice, elle est faite servante du Seigneur, tandis que Zacharie reste muet au Temple. La joie de l’humble servante a à peine « grandi » (Isaïe 9 :2), elle n’a même pas sa place dans son cantique, tant elle la rend toute au Seigneur pour le laisser lui être plus grand. Cette dimension toute discrète, cachée, retenue, attachée aux premiers commencements de l’enfance, nous fait entendre différemment l’étrange texte de Sophonie : « Il est tout joyeux à cause de toi, il reste silencieux dans son amour, il jubile à cause de toi dans les cris de joie » (3 :17). C’est bien cette disproportion inouïe, cette voix de fin silence plus forte que tous les orages (1 Rois 19 :12), qui fait le ton propre de Noël, et c’est un ton qui les contient tous.

Le ton du jugement

Ce ton léger contient aussi la voix de feu de Jean-Baptiste, la rude tonalité du jugement et du travail à accomplir. Quel juge le Seigneur nous a-t-il envoyé ? C’est un petit enfant, privé de parole, moins terrible que ce Messie tenant prêtes la pelle à vanner et la cognée à la base de l’arbre. On ne comparaît pas devant lui, on le prend dans ses bras. Mais rappelons-nous l’expérience de celui qui prend un nouveau-né dans ses bras. Il ne sait ce que l’enfant voit, ni si l’odeur qu’il perçoit est amie, ni si la voix qu’il entend est assez douce, ni avec quelle force on peut tenir un être si fragile. La fragilité, l’obscurité sensitive, l’étrangeté de la créature venue au jour encore toute ensommeillée de nuit, deviennent la fragilité de la personne censée le garder et le protéger. Elle sait que l’enfant, qui n’a pas toutes nos distances et nos politesses, peut recevoir de plein fouet une angoisse dont nous n’avons pas conscience. Notre sûreté de nous-mêmes et notre trésor d’attentions n’ont aucun poids face à la brusque inquiétude du nouveau-né qui crie, qui ne crie contre personne et qui nous attriste d’autant. Il faut une grande confiance pour croire qu’avec tout ce que nous sommes, nous ne ferons pas de mal à un être si offert à l’affect présent. Celui qui tient l’enfant se confie à lui autant que l’inverse ; mais c’est dans le Seigneur qu’il a confiance, lui qui sonde les reins et les cœurs qu’il a faits, et qui ne craint pas d’appeler par leur nom le loup autant que l’agneau. Avec le petit enfant on est celui qu’on est sans recours et sans ruses. Voilà le juge que le Seigneur nous envoie : « Il jugera mais non sur l’apparence, il se prononcera mais non sur le ouï-dire » (Isaïe 11 :3). En lui le jugement est comme retenu, suspendu, pour un temps de grâce où nous devons apprendre à nous approcher sans crainte de la parole faite chair, et à aimer sa vérité autant que le Seigneur la désire au fond de nous quand il nous l’envoie.

Le ton de la nuit

S’il est un étonnement que les lectures de l’Avent nous réservent, c’est leur violence, c’est la nuit profonde où elles nous conduisent, et où le Seigneur nous parle une langue étrangère. « Et voici : détresse et ténèbres, obscurité angoissante, nuit dans laquelle on est poussé » (Isaïe 8 :22).Cette nuit, il nous faut vraiment y descendre pour que notre attente soit vraie : « Plus qu’un veilleur ne guette l’aurore, attends le Seigneur, Israël » (Psaume 130 :6-7). A cette attente pleine d’angoisse, le Seigneur répond de manière étrange. Cette rupture de ton, infime, délicate, qui fait que la nuit ne sera plus jamais la même, je voudrais y demeurer un peu.

« Et voici : détresse et ténèbres »

Le premier dimanche de l’Avent, l’Evangile annonce ainsi les temps de la seconde venue: «Malheureuses les femmes qui seront enceintes et qui allaiteront en ces jours-là, car il y aura une grande misère dans le pays, une grande colère contre ce peuple » (Luc 21 :23). Nous sommes mis face à notre propre impuissance, à nos douleurs qui n’enfantent que du vent (Isaïe 26 :18), à l’alliance passée avec la mort (Isaïe 28 :15), qui porte son fruit de péché et nous fait quotidiennement enfanter la mort. Avant d’être couverts de la gloire de Dieu et du manteau de sa justice (Baruch 5 :1-2), nous revêtons la robe de suppliante, et nous descendons simplement dans la détresse de nos vies, plus grande que tout péché assignable : nous y trouvons une captivité où nos facultés sont entravées et sans fruit, nos domaines rendus sans valeur et nos terres dévastées sous les yeux du Seigneur qui se tait (Jérémie 31 :28), la « torpeur » au jour le jour (Isaïe 29 :10) et « point d’aurore » (Isaïe 8 :20) pour l’avenir, parfois l’absence même de goût et de courage pour la prière d’être délivré du mal (Baruch 2 :8). Il est difficile d’attendre celui « qui sauvera son peuple de ses péchés » (Matthieu 1,21), mais s’il est un ton juste, c’est celui de la confession (« dans la faute j’ai été enfanté » Psaume 51,7) de la conversion et de la supplication (« Crée en moi un cœur pur » Psaume 51,12), du cri qui désire tant la présence (« Jusques à quand me cacheras-tu ton visage ? » Psaume 13,2) et qui, contre toute apparence, contre toute raison, ne peut pas croire qu’il n’est pas entendu : « Dans cette nuit où je crie en ta présence » (Psaume 88,2).

Le Seigneur donne une étrange réponse, en nous découvrant le visage d’un petit enfant qui est son Fils. Il se penche enfin pour entendre notre cri (Psaume 40 :2), en nous donnant un enfant qui n’apporte rien que lui-même, et qui comprend nos paroles moins encore que nous. Enfin nous contemplons sa force et sa gloire (Psaume 63 :3), mais ce n’est pas dans le sanctuaire, c’est dans les veilles de la nuit, sur notre couche de tourments où nos lèvres redisent son nom (Psaume 63 :7). C’est une étrange victoire sur nos ennemis, sans « partage du butin » (Isaïe 9 :2), une étrange gloire, une étrange puissance, qui ne nous défend pas, qui ne met pas fin à la nuit, qui ne fait justice aux pauvres qu’en mettant le Seigneur parmi eux. Cependant, Dieu a mis en lui tout son amour, toute l’espérance et tout ce qui a du prix en ce monde, et il nous l’a confié. Cet évènement nous enseigne le ton juste de la supplication et de la confiance en cette nuit de Noël. C’est celui du Psaume 131 : «Je ne poursuis ni grands desseins ni merveilles qui me dépassent / Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse / Mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant près de sa mère » (Psaume 131 :1-2). Nous crions toujours dans les profondeurs, nous mourons d’angoisse, nous ne comprenons rien, mais soudain nous découvrons une manière nouvelle, humble, de ne plus nous approprier le trouble de notre âme, de la confier à un devenir fragile, incertain, dont nous ne savons rien. Et nous pressentons que le milieu de notre nuit est le lieu même où nous sommes attendus, où nous avons à naître. C’est Dieu lui-même qui est venu nous l’apprendre.

La ténèbre n’est point ténèbre

« il passera en Juda, inondera et traversera : et le déploiement de ses ailes couvrira toute l’étendue de ton pays, Emmanuel. » (Isaïe 8 :8)

Nous relisons les paroles du prophète : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière » (Isaïe 9 :1). Cette lumière est celle de l’espérance donnée par la naissance d’un héritier. Mais cette espérance est fragile comme l’est l’enfant, elle n’est qu’un signe. Aussitôt l’enfant né, le texte très obscur continue d’osciller entre l’annonce de la dévastation par le roi d’Assour (8 :8) et la promesse de l’abondance paisible (7 :21), sans que l’on sache toujours distinguer entre la peinture des jours de malheur et celle des jours de bonheur. Pas plus que l’achat du champ par Jérémie, le signe de l’Emmanuel ne préserve le pays d’être dévasté. Que faire d’une présence si voilée, si ténue, si impuissante ? Comment est-ce que le cœur ne serait pas plein d’épouvante, quand Dieu est avec nous et qu’il en va de même qu’auparavant ? Lorsque le Seigneur menace de malheur le peuple éloigné de lui, il dit : « Tu seras abaissée, ta voix s’élèvera de la terre, de la poussière elle s’élèvera comme un murmure. » (Isaïe 29 :4) Voici Dieu né parmi nous, au plus près de nous, voilà que la vérité a germé de la terre, et malgré tout nous retrouvons cette même détresse à la fin, dans le Psaume de la Passion : « Tu me mènes à la poussière de la mort » (Psaume 22 :16).

Cette détresse est bien la même, et c’est pour cela qu’il est venu, c’est pour l’habiter avec nous. Cette venue ne peut nous faire autres que nous ne sommes, et ne nous aidera sans doute pas dans l’adversité. Mais il est né au cœur de la nuit, et par là le sens de la nuit est changé radicalement. Déjà ce sont les Béatitudes : « Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux ! » (Matthieu 5 :3). C’est lui qui est là pour nous le jeter à la figure, avec joie, que sa joie est nôtre, parce que nous saurons vivre le malheur et l’angoisse pour lui, par lui, et parce qu’il nous aura rendus pauvres avec lui, ce dont nous serions aussi incapables que d’avoir le cœur pur. Il vient dans cette nuit ; il veillera pour nous tous à Gethsémani, dans l’angoisse, et il pourrait mettre ses mots dans les nôtres, pour redire: « J’attends le Seigneur qui cache sa face à la maison de Jacob » (Isaïe 8 :17). La fragilité de l’enfant a fait de la nuit un doux refuge, l’angoisse de la mort n’empêchera pas la nuit de receler une présence.

Parce que Dieu a pris chair auprès de nous, notre présence charnelle, à tout moment, est toute pleine de l’alliance. « Dieu avec nous », « le Seigneur est avec toi », « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » (Jean 15 :5) ; sans lui nous ne pouvons rien ressentir, rien vouloir, rien comprendre, nous rappeler ni espérer. Quand le Seigneur dit « Je serai avec toi » (Exode 3), ce n’est pas pour faire les choses à notre place, c’est pour nous envoyer de rude manière, avec notre tâche à accomplir : mais nous agissons et souffrons en son nom. Nous le sentons parfois dans la grâce de ces moments où l’eau se mêle manifestement au vin, où le Royaume est là, où la moindre vexation, souffrance, laideur, fatigue, nous comble de joie, parce qu’elle est vécue en vue de Dieu. Nous n’avons pas à attendre que notre heure soit venue, que nos destinées soient claires et nos angoisses apaisées, pour que l’eau soit changée en vin (Jean 2 :4), et que l’âme du Christ nous sanctifie. Nous n’avons pas même besoin de le sentir.

L’abondon à la nuit

« La nuée couvrit la Tente de la rencontre »(Exode 40 :34)

D’emblée la nativité est placée dans l’obscurité de la nuée, lorsque l’Esprit prend sous son ombre la jeune femme, la fait sienne et l’emplit de la présence de Dieu. Cette présence continue d’être voilée dans le petit enfant qui ne parle pas encore avec autorité, faisant encore trop corps avec ses vertus pour qu’on l’appelle « petit » ou « humble ». La venue du Seigneur, qui doit ouvrir les yeux des aveugles, frappe aussi d’un aveuglement plus profond ceux qui croient voir : « Engourdis le cœur de ce peuple, appesantis ses oreilles, colle-lui les yeux ! Que son cœur ne comprenne pas ! Qu’il ne puisse se convertir et être guéri ! » (Isaïe 6 :9-10 ; Mathieu 13 :15). Dans cette incertitude où nous sommes, où le Seigneur ne nous dit jamais qui il est, où le miracle de sa présence pourrait toujours n’avoir été qu’un rêve de notre désir, il ne nous est pas demandé de voir et de savoir où nous allons quand nous le suivons. Il est seulement dit, dans une angoisse dont nous ne voyons pas l’aube, « Que ton cœur ne défaille pas » (7 :4) et « Si vous ne tenez pas à moi, vous ne tiendrez pas » (7 :9). Avant tout, il nous est demandé de savoir en qui nous croyons, d’appeler Dieu « mon Seigneur et mon Dieu », « mon espérance » (Psaume 70 :5), « mon partage et ma coupe ». Nous sommes toujours « à son ombre désirée » (Cantique 2 :3). De cette nuit-là, quoiqu’il arrive, on ne s’éveille pas comme l’homme qui a rêvé de boire et qui meurt de soif en ouvrant les yeux, « épuisé et la gorge sèche » (Isaïe 29 :8).

Le signe de l’Emmanuel est un nouveau-né, et le plus décisif advient au moment où il ne discerne pas encore le bien du mal (7 :16) et reçoit d’un autre sa nourriture. Notre maître intérieur est un Dieu qui a tout désappris pour prendre chair auprès de nous, il a dû recevoir dans la prière sa vocation de « Fils Bien-Aimé », apprendre à dire « Mon Père » et à faire de sa volonté son pain quotidien, « apprendre l’obéissance » (Hébreux 5 :8). Il nous demande d’avoir nous aussi un cœur qui écoute et de tout apprendre à nouveau, même si nous sommes humiliés dans nos facultés, tels le pays dévasté, ensauvagé d’épines et tout simplifié, où l’on se nourrit de lait et de miel ; ou tels l’arbre abattu dont il ne reste plus que la semence, mais dont la semence est sainte (Isaïe 6 :13). Il est venu se confier à nos bras pour nous demander, à nous aussi, un très grand abandon. Il veut que, là où nous cherchons sans trouver, là où nous appelons sans réponse, là où les fils de l’âme sont rompus et où la vie ne parvient plus à se saisir elle-même, nous croyions fermement que la croissance du grain de sénevé se poursuit en nous, égale et silencieuse, pour que nous enfantions le Royaume.

L’alliance de chair et de sang

Pour que nous soyons en lui et lui en nous, il nous faut d’abord habiter la terre et notre corps, puisque lui, le Seigneur, a choisi de prendre chair parmi les fils d’homme. Notre attachement à notre corps pétri de poussière se met à tisser et figurer l’Alliance. C’est qu’il n’y a pas de lien qui soit à la fois aussi dénué d’explication et aussi indissoluble. Nous ne comprenons pas pourquoi c’est ce corps-là, ce ton de la voix et cette carrure, cette manière de percevoir et de souffrir le monde, cette expressivité du visage et des mains, qui nous sont échus. Nous recevons cela comme une grâce ou comme un fardeau, mais nous n’y pouvons rien. Nous sommes même incapables de démontrer ce rapport obscur qui me fait crier de douleur quand une aiguille pique cette chose que j’appelle ma main ; et cependant nous sommes attachés, vulnérables, exposés par ce corps venu au monde parmi les autres êtres, que nous n’avons ni formé ni choisi.

Or étrangement cela même peut être refusé ; l’œuvre peut dire de l’ouvrier : « Il ne m’a pas faite », et le vase du potier « Il n’y entend rien » (Isaïe 29 :16). Il n’y a que le Christ en nous, d’âme et de corps, qui puisse nous apprendre à recevoir sans inquiétude cette vie des mains du Père, avec le mystère du corps présent, senti, vécu. L’attachement juste à cette ardeur de vie veut que la vie ne se retourne pas sur elle-même pour saisir et maîtriser sa subsistance (Matthieu 6 :24), mais qu’elle rende grâce, se sachant revêtue par le Christ d’une robe d’immortalité que ni Salomon, ni les lys des champs n’ont encore jamais passée. Voilà l’attachement dernier par lequel le Seigneur nous saisit : l’impuissance qui lie la créature à son propre être, dans l’angoisse et l’incompréhension, et le corps du Christ en elle pour lui faire désirer, contre tout mérite, d’être aimée du Seigneur.

Dieu ne voudrait pas d’une alliance qui soit la décision d’une pure liberté d’indifférence. Lui-même, ses entrailles s’émeuvent lorsqu’il envisage de rejeter son fils aîné : « Chaque fois que j’en parle, je dois encore et encore prononcer son nom, et en mon cœur, quel émoi pour lui ! » (Jérémie 31 :20) Et nous avons à aimer comme il aime, de tout notre être, de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit. Notre incarnation est le type même de cet attachement qui résiste à tous nos calculs et à toute notre rage, là même où nous ne pouvons faire un pas de plus. Il y a des lieux de notre vie où le détachement nous est aussi impossible que de jeter au feu toute espérance et toute fidélité. Il y a des résolutions que nous ne saurons jamais justifier, comme le désir du baptême, et qui nous sont chères, ardentes, totales, sans condition. Quand bien même seraient affaiblis le son de notre voix et la lumière de nos yeux, quand bien même il ne resterait plus que la présence nue d’un peu de poussière et d’un souffle mince, nous serions là, avec lui, encore très loin du « pays où l’aurore est nuit noire » (Job 10 :22). Il nous remet parfois comme un fardeau notre poids de chair et de désir. Mais c’est un joug léger, un doux fardeau d’amour, celui qu’il vient partager avec nous dans la nuit du monde, lui « doux et humble de cœur » (Matthieu 11 :29).

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